Aujourd’hui, je vous emmène au cœur de la forêt de Compiègne dans les Hauts-de-France, à la découverte de la « clairière de l’Armistice », où a été signé l’armistice marquant la fin de la Première Guerre Mondiale mais aussi celui de juin 1940 entre la France et l’Allemagne.
C’est à la fois un lieu de mémoire et un musée, où vous pouvez voir la reconstitution du wagon de l’armistice où s’est déroulée la signature. Dans cet article, je vous propose de découvrir son histoire, des photos et des informations pratiques si vous voulez aller le visiter à votre tour.
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L’armistice de 1918
Comment Compiègne, petite ville de l’Oise dans les Hauts-de-France, en est-elle arrivée à accueillir ces événements historiques de premier plan ? Nous allons replonger dans l’histoire tout en découvrant l’intérieur du Mémorial de l’Armistice de Compiègne.
Pour le comprendre, il faut revenir à l’été 1918. Après quatre année de conflit, la Première Guerre Mondiale touche à sa fin, la déroute se profile pour les Allemands et l’on entend dire que des émissaires ont pris la route depuis l’Allemagne pour venir négocier l’arrêt des combats.
Le maréchal Foch, qui commande le principal front du conflit, le front de l’Ouest (au niveau du nord de la France, de la Belgique et de l’Alsace-Moselle), pressent qu’il va falloir trouver un lieu pour négocier un armistice.
L’homme a, en 1918, installé son quartier général à Senlis… mais très vite, il rejette l’idée d’y organiser la signature de l’armistice, tout comme il s’oppose au choix d’un édifice symbolique à Paris ou autour de Paris (à l’instar du château de Versailles, où sera signé plus tard le traité de paix entre les Alliés et l’Allemagne).
Pour quelle raison ? Parce qu’il estime qu’il faut accorder un certain respect aux vaincus, préserver ce moment historique de l’agitation des foules, de la presse, de tout ce qui pourrait perturber les débats… Senlis ayant été très meurtrie par le conflit armé, il aurait sans doute été difficile de contenir la colère des habitants en voyant arriver l’ennemi.
Une futaie de la forêt de Compiègne retient ainsi son attention parmi les possibilités qui lui sont proposées. Ce sous-bois est à la fois facile d’accès par le train (il y a déjà des rails reliés à la gare de Compiègne) tout en permettant de s’éloigner facilement pour « semer la presse » si toutefois la situation devait dégénérer.
Or, le maréchal possède un train spécial dont il se sert pour aller rendre visite aux troupes sur le front. C’était à l’époque assez courant chez les personnalités d’Etat de premier plan de faire aménager des trains, avec voiture-salon, voiture-lit, voiture-bureau… Cette solution paraît donc optimale.
On achemine deux trains vers cet espace isolé, dans le plus grand secret : le train de l’état-major de Foch et un second train pour la délégation allemande. On crée un chemin en caillebotis entre les deux pour que les gens puissent passer aisément de l’un à l’autre. Les discussions démarrent le 8 novembre 1918… Pas de réelles discussions car en réalité, un texte est soumis aux Allemands, à qui l’on donne 3 jours pour réfléchir.
Les débats vont se tenir dans un ancien wagon-restaurant en bois de teck, commandé en 1913 par la Compagnie internationale des wagons-lits. Il circulait auparavant sur les lignes de Saint-Brieuc, Le Mans puis sur la liaison entre Paris et Deauville. En septembre 1918, il est réquisitionné pour les besoins de la guerre et transformé en wagon-salon, rejoignant le train du maréchal seulement le 29 octobre, donc très peu de temps avant l’armistice.
C’est ainsi que les échanges avec les Allemands débutent, durant la nuit du 10 au 11 novembre 1918, aboutissant à la signature de l’armistice de la Première Guerre Mondiale autour de 5h15 du matin. Il faudra attendre 11h pour que les combats cessent, le temps de prévenir l’ensemble des unités. La fin de la guerre est marquée par le tir symbolique de 1200 coups de canon à Paris, et par les cloches de toutes les églises de France qui se mettent à sonner pour annoncer la nouvelle.
Dans le musée, on vous explique tout sur le wagon de l’armistice de Compiègne : son histoire, le choix du lieu, les personnes présentes ce jour-là, à quelle place elles étaient assises. La visite débute et s’achève par cette voiture très symbolique.
Mais il faut raconter la suite de l’histoire… car le wagon de l’armistice que vous voyez aujourd’hui au Mémorial n’est pas LE wagon réel où a été signé l’armistice… et les nazis y sont pour quelque chose.
La clairière de l’armistice après 1918
Vous vous doutez bien qu’après 4 ans de conflit mondial qui ont laissé de lourdes traces dans la société et l’économie française (et pas que), le site précis où a été signée la fin des hostilités a acquis un statut très symbolique.
On le surnomme la « clairière de Rethondes » et vous verrez sans doute cette appellation en vous renseignant sur l’endroit, car il est proche de l’ancienne gare de Rethondes, petite commune voisine de Compiègne dans l’Oise où passait justement la voie ferrée sur laquelle ont circulé les deux trains.
Clairière célèbre, donc, où l’on aménage en 1922 plusieurs monuments comme autant de symboles de paix et d’hommages.
Le wagon, quant à lui, est récupéré en 1919 par la Compagnie internationale des wagons-lits, qui en est propriétaire… mais très vite, le gouvernement français le rachète en raison de sa valeur symbolique. Il reste exposé dans la cour d’honneur des Invalides pendant 6 ans, entre 1921 et 1927, avant d’être restauré et rendu à Compiègne, dont le maire de l’époque s’est beaucoup battu pour récupérer cette pièce historique.
On aménage alors un bâtiment pour l’accueillir, inauguré en 1927.
Quelques années plus tard, l’Europe tombe sous le joug de l’Allemagne nazie… En mai 1940, le Troisième Reich envahit les Pays-Bas, la Belgique, le Luxembourg et la France. Une avancée fulgurante, qui pousse la France à demander un armistice en juin 1940.
Les rôles se retrouvent inversés. L’Allemagne vaincue de 1918, qui s’est sentie humiliée par le traité de Versailles, se retrouve en position de vainqueur à ce stade de la Seconde Guerre Mondiale. Hitler ne va pas avoir la grâce du maréchal Foch, d’organiser la signature à l’abri des regards et dans la discrétion, bien au contraire.
Il décide d’humilier les Français… et quelle plus belle humiliation que de les forcer à signer cet armistice dans le wagon-même où avait été actée leur victoire ! Les équipes de l’organisation Todt (« les ingénieurs du Troisième Reich ») viennent sur place et démolissent le mur du musée pour pouvoir sortir le train. Ils poussent le vice jusqu’à le déplacer à l’emplacement exact où avait été signé l’armistice de 1918.
Hitler vient en personne le 21 juin, laissant la finalisation de l’armistice le 22 juin au général Keitel.
Peu après, pour parachever l’humiliation de la France, les nazis récupèrent le wagon et l’envoient à Berlin… avant de dynamiter les monuments présents dans la clairière, en filmant le tout. Seule la statue de Foch échappe à la folie destructrice, donnant de fait l’impression d’être restée là pour contempler les ruines.
Le wagon restera aux mains des nazis jusqu’à la fin de la Seconde Guerre Mondiale et, à l’approche de leur défaite, en avril 1945, ils finiront par le brûler dans la forêt de Thuringe.
Celui que vous voyez aujourd’hui dans le musée de l’armistice est un wagon de la même série, créé en 1913 et aménagé à l’identique. Ce n’est donc pas une simple copie mais bien une pièce qui a elle aussi une valeur historique.
Que voit-on dans le musée de l’armistice ?
Le musée a été reconstruit assez rapidement après la fin de la Seconde Guerre Mondiale, et enrichi par plusieurs salles qui évoquent les deux guerres et le contexte dans lequel chacun des armistices est intervenu.
On peut consulter de nombreux documents (photos, vidéos, stéréogrammes) mais aussi découvrir des objets rescapés de cette époque : des appareils photo, des vêtements, des objets religieux parfois créés par les soldats à partir de débris militaires (douilles, etc), des armes…
Le musée présente aussi de jolies maquettes.
L’espace est lumineux, la circulation fluide et les explications riches, avec beaucoup de panneaux très didactiques pour comprendre les conflits. Le musée rend aussi hommage à tous les combattants étrangers qui sont venus se battre pour la France.
On trouve des toilettes à mi-parcours et une petite boutique à la fin. La visite est assez rapide, 1h30 environ, mais très intéressante.
Les monuments de la clairière de Rethondes
La clairière elle-même reste assez dépouillée. En 1918, comme je l’ai mentionné, cette zone était une futaie, il y avait donc sur place de grands arbres. Ils ont été rasés par la suite, créant un espace ovale dégagé de 100 mètres de largeur environ, où les deux voies ferrées sont bien visibles.
L’emplacement du train français est marqué par une pierre portant l’inscription « Maréchal Foch », l’emplacement du train allemand par une pierre « Les plénipotentiaires allemands ».
Au centre, on trouve une grande dalle portant l’inscription « Ici le 11 novembre 1918 succomba le criminel orgueil de l’Empire allemand vaincu par les peuples libres qu’il prétendait asservir ».
Au ras du sol, je trouve la lecture du lieu un peu difficile, il mériterait un espace en hauteur pour mieux visualiser la perspective (une passerelle, un belvédère…). Pour vous donner une idée, j’ai pris la photo de la dalle ci-dessus en levant les bras au maximum, ça reste difficile à lire et j’ai gardé cette impression que l’endroit avait été conçu pour être regardé « en vue aérienne ».
La statue de Foch, créée en 1937, contemple toujours les lieux à notre époque…
On trouve une variété d’autres monuments prônant la paix, rendant hommage aux soldats et aux morts de différents conflits, y compris certaines guerres plus récentes.
En quittant le site, vous croiserez aussi un grand monument dédié aux libérateurs de l’Alsace-Lorraine, créé par Edgar Brandt…

Visiter la clairière de l’armistice à Compiègne
Comment aller sur place ?
Le Mémorial de l’armistice se situe sur la route de Soissons, au cœur de la forêt de Compiègne. Vous pouvez y accéder en voiture depuis le centre-ville en 10 minutes environ via la N31 (coordonnées GPS : N 49 42 917° E 002 90 576°) ou prendre un taxi (site officiel de la Centrale des taxis de Compiègne). Un grand parking est disponible sur le site.
L’alternative un peu plus sportive est de marcher ! C’est le choix que j’ai fait, il y a une très belle balade à faire en passant par le Belvédère des Beaux-Monts en pleine forêt… mais il faut compter 2h de marche (on peut bien sûr prendre des raccourcis pour aller plus vite mais il y a environ 8 km de parcours aller). Il est aussi possible de louer un vélo.
Horaires d’ouverture de la clairière de l’armistice
Horaires d’ouverture :
- Du 1 avril au 30 septembre de 10h à 18h tous les jours, dernière entrée à 17h15.
- Du 1er octobre au 31 mars de 10h à 17h30 tous les jours sauf le mardi, dernière entrée à 16h45.
Vous pouvez consulter le prix des billets à jour ici. C’est le prix pour accéder à la partie musée, avec le wagon de l’armistice… mais vous pouvez accéder librement à la clairière.
Il n’est pas nécessaire de réserver à l’avance.
J’espère que cette visite vous intéressera ! A Compiègne, vous pouvez aussi visiter le Mémorial de l’internement et de la déportation, installé sur le site de l’ancien camp de Royallieu, camp de transit d’où est notamment parti le premier convoi de France vers Auschwitz. Un bon moyen d’approfondir l’histoire de ces périodes troubles de notre passé tout en faisant du tourisme !
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